Alata - Jusqu'à 18 ans de réclusion pour l'assassinat de Jean-Michel German

Rédigé le 20/12/2025
La rédaction avec l'AFP

Trois hommes appartenant au milieu criminel corse ont été condamnés en appel à 16 et 18 ans de réclusion criminelle pour l'assassinat d'un mécanicien à Alata en 2016, une "exécution minutieusement organisée" selon le verdict rendu à Paris dans la nuit de vendredi à samedi.

La peine la plus lourde a été prononcée contre Mickaël Carboni, 33 ans, à qui la cour d'assises de Paris a prêté "un rôle leader" et qui, comme les autres, s'affirmait innocent. Mickaël Sanna, 40 ans, et Sébastien Carbuccia, 41 ans, ont été condamnés à seize ans de réclusion.
Pour avoir participé à la préparation du crime, quatre ans de prison ont été prononcés contre Ange-Marie Gaffory, 39 ans. Un cinquième accusé, François Cay, 41 ans, a en revanche été blanchi pour ces préparatifs, condamné à un an de prison pour un délit connexe.
Ils avaient été acquittés en première instance à Ajaccio. Mais ce verdict avait été entaché par la découverte d'une photo de la liste des jurés dans le portable d'une figure de la grande criminalité insulaire. Le procès en appel avait été dépaysé à Paris.
Au moment des faits, ce groupe était surveillé par la police dans une enquête sur un trafic de stupéfiants. La cour a relevé leur "ancrage" dans la criminalité.
Rien de tel pour Jean-Michel German, exécuté au matin du 7 septembre 2016, devant le domicile de sa compagne à Alata (Corse-du-Sud), alors qu'il s'apprêtait à partir travailler.
Cet ancien toxicomane n'avait plus eu maille à partir avec la justice depuis 2007. Il ne connaissait que Gaffory, un lien ténu et ancien.
"Ce n'est pas parce que le mobile n'a pas été trouvé qu'il n'existe pas", a plaidé Me Benjamin Liautaud, avocat de la famille German.

"Faisceau d'indices" 
 
Durant deux semaines, la défense s'est employée à entretenir chez les jurés la flamme du doute dans un dossier privé de preuve implacable. "Quand le doute fiévreux et insomniaque va frapper à votre porte, vous allez réussir à vivre?", leur a demandé une avocate de Carboni, Me Charlotte Cesari.
Pas de preuve absolue, pas d'assurance sur l'identité du ou des tireurs, pas de mobile. Mais un "faisceau d'indices qui désigne les accusés et uniquement eux", avait requis jeudi l'avocate générale.
La pièce angulaire de l'accusation, c'est la voiture des assassins. L'utilisation de cette C4 par le groupe dans les semaines précédant le crime, est avérée. Mais, la défense a avancé l'hypothèse d'une deuxième équipe qui l'aurait utilisée.
Les policiers qui surveillaient cette voiture volée n'identifient pas les occupants ce jour-là, et n'interviennent pas après les coups de feu.
Mais, selon l'arrêt lu par le président, les quatre condamnés sont "les seuls à avoir été soit au contact, soit à l'intérieur de cette C4".
Certes, l'expertise ne permet pas de conclure scientifiquement que ce sont Carbuccia et Carboni qu'on entend sur un enregistrement au moment de la crémation de la voiture.
Mais la cour a "pris en compte" les déclarations des policiers qui les écoutaient depuis plusieurs mois et ont affirmé avoir identifié leur voix.


Pourquoi ? 

"Pas des anges, pas des assassins. Ce n'est pas la bonne équipe", avait plaidé un avocat de la défense, Camille Romani, relevant que ces surveillances anciennes, n'avaient pas mis au jour d'acte préparatoire ou de conversations évoquant Jean-Michel German.
Mais, selon l'arrêt, les alibis ont été "contredits par les éléments de la procédure", quand ils n'étaient pas tardifs et douteux. Ainsi celui de Carbuccia, qui évoque cette femme mariée avec qui il aurait passé la nuit sans vouloir en révéler le nom pour ne pas lui nuire.
Lui, Carboni et Sanna apparaissent ensemble sur des images de vidéosurveillance, un peu plus d'une heure après les faits, dans le secteur d'Ajaccio.
Leurs protestations d'innocence "n'ont pas tenu le choc des débats", tranche l'arrêt.
Jean-Louis German, le père de la victime dont l'émouvante dignité a été saluée par tous, avait juste demandé que justice passe. Il repart avec des noms mais sans réponse à cette question qui le hante: pourquoi?