Révélé au grand public grâce à LOL : qui rit, sort ! et La Bande originale sur France Inter, l’humoriste suisse Alexandre Kominek jouera pour la première fois en Corse le 16 juillet prochain à l’occasion du festival Cap sur le Rire à Erbalunga. Il y présentera Bâtard sensible, un spectacle mêlant anecdotes personnelles, humour frontal et observation sociale.
Vous allez jouer pour la première fois en Corse à l’occasion du festival Cap sur le Rire. Que représente pour vous le fait de jouer ici, dans un cadre comme Erbalunga ?
Je suis très content, d’abord parce que ça a l’air magnifique ! C’est aussi excitant de jouer dans un cadre aussi unique et paradisiaque, et en plus en Corse où je ne connais ni le public, ni les conditions. En tout cas, mes amis humoristes qui sont déjà passés là-bas m’ont dit qu’ils avaient adoré et que les Corses étaient formidables, alors j'ai hâte.
Avez-vous une idée du public corse ? Adaptez-vous parfois vos spectacles en fonction des régions ?
Il peut m’arriver d’avoir des petites parenthèses sur la région si je note deux ou trois trucs marrants dans la journée, des choses qui sortent du lot par rapport à ce que j’ai l’habitude de voir. Il pourra sûrement y avoir des blagues sur la Corse, comme il pourra ne pas y en avoir du tout : c’est au feeling, et c’est surtout selon ce que je vois et ce que je remarque. Mais en général, j’aime bien intégrer au moins une petite pensée sur le lieu dans lequel je joue, et inclure le public pour lui montrer que je ne suis pas venu les mains dans les poches, et que je m'intéresse aux gens devant lesquels je joue.
Vous allez jouer Bâtard sensible au festival. Ce titre, est-ce une manière de revendiquer vos contradictions ?
Oui, complètement. Je pense qu’on est tous un peu contradictoires à notre façon, dans notre manière d’être. Moi, j’ai ce côté où je peux donner l’impression d’être un bâtard, parce que je vais faire des blagues un peu méchantes, un peu trash ou un peu dures, mais en réalité, c’est une protection que j'ai développée pour cacher ma sensibilité. C’est d’ailleurs le fil rouge du spectacle : on commence sur un ton assez dur, et petit à petit, on découvre qu’il y a un cœur qui bat dans ce corps ignoble, même si on reste quand même sur une thématique de base axée sur la fête, les excès, le sexe. J'ai l'habitude de dire que c'est un carnet de voyages érotico-pornographiques.
Vous parlez sans filtre de sexe, de rapports de domination, d’ego masculin… Qu’est-ce qui vous attire dans ces thématiques ?
Ce qui m’intéresse, c’est la partie intime, celle qu’on n’oserait pas dévoiler en public. J’aime parler de ces anecdotes un peu honteuses, un peu gênantes, qu’on ne raconterait jamais à table, alors qu’en réalité, on est nombreux à les avoir vécues. Les anecdotes m’ont permis de faire une sorte d’humour d'observation où les gens se retrouvent mais n'ont pas envie de se reconnaître en public. Très souvent, après le spectacle, des gens viennent me voir ou m’écrivent pour me dire : “Moi aussi, moi aussi, merci.” Mettre en avant des choses qu'on garde habituellement pour nous, c’est vraiment ça qui m’intéresse.
Votre humour est frontal, parfois provocateur. Y a-t-il des sujets sur lesquels vous vous interdisez d’aller ?
Non. Je ne vais pas faire d'humour politique par exemple, mais tout simplement parce que je suis nul là-dedans et parce que ça ne m'intéresse pas. Sinon, je ne me mets aucune barrière et aucune interdiction. Je m'autorise tout, à condition que ce soit drôle.
Vous sentez-vous “attendu au tournant” sur certains sujets ?
Je ne crois pas, je n'ai pas encore eu de polémique. (rires) Vu mon spectacle, je pense que les gens savent qu'il n'y a rien à attendre de moi. Ils savent que je ne vais jamais me brider, ils savent sur quoi je vais faire des blagues, donc je ne pense pas qu'on m'attende au tournant, en tout cas sur scène.
À quel moment vous êtes-vous dit que vous vouliez vivre de l’humour ?
C’était après ma toute première scène. J’ai participé à un plateau ouvert à Lausanne, en Suisse, une sorte de comedy club qui donne leur chance aux débutants. Malheureusement pour moi, ça a marché, j’ai été touché par les rires du public, et c’est comme ça que ça a commencé.
À vos débuts, aviez-vous en tête un modèle d’humoriste, ou au contraire, une envie de casser les codes ?
Je n’avais pas vraiment de modèle précis. J’ai grandi en regardant des humoristes très variés, de Gad Elmaleh à Dieudonné, et plus tard, avec YouTube, j’ai découvert les humoristes américains comme Bill Burr. Mais je ne me suis jamais dit que je voulais faire le même type d’humour qu’eux. Il y a quand même Jim Jefferies, un humoriste australien, qui m’a marqué dans sa manière de raconter des anecdotes très personnelles, de parler ouvertement de sujets qui peuvent être un peu tabous. C’est peut-être lui qui m’a le plus influencé, mais je n’ai jamais eu de modèle à proprement parler.
Votre passage dans LOL : qui rit, sort ! ou dans La Bande originale de France Inter vous a propulsé en France. Ça a été un tournant ?
Oui, clairement. Ça m’a permis de toucher un public beaucoup plus large, qui ne m’aurait sans doute jamais découvert autrement. La Bande originale, par exemple, m’a fait connaître auprès de gens peut-être un peu plus âgés, qui ne seraient pas forcément allés taper mon nom sur Internet. Et puis il y a LOL… Là, c’est marrant, parce que ce sont surtout les enfants qui me reconnaissent dans la rue, alors que mon spectacle est déconseillé au moins de 16 ans. Quand je vais dans un restaurant, je vois des enfants à table avec leurs parents, et ils disent : “Regardez, c’est le monsieur de LOL !” Cela dit, avoir un public jeune, c’est bien, ça veut dire que j’ai un futur public à qui prendre des sous. (rires)
Il y a une forme d’ironie dans le fait qu’un humoriste suisse devienne l’un des visages de l’humour français…
C’est très bien ! Avec tous les frontaliers et tous les Français qui viennent piquer du travail aux Suisses, enfin la revanche, enfin un Suisse qui vient piquer l'argent des Français. On en avait marre, c’était trop d'années de souffrance. Plus sérieusement, je pense qu’il y a des vagues. Il y a quand même eu des Belges, des Suisses, des Français qui sont très doués en humour, et il y aura peut-être des Corses un jour.
Quels humoristes vous inspirent aujourd’hui, ou vous font simplement rire ?
Il y a des gens qui me font beaucoup rire comme Julien Santini. J’ai aussi toujours été impressionné par Marina Rollman, en termes d'écriture, même si elle a un peu fait une pause sur sa carrière d'humoriste. J'aime aussi beaucoup Benjamin Tranié. En tout cas, c’est très différent : on passe du personnage un peu absurde, un peu fou avec Julien, et l'écriture même avec Marina.
Vous venez de terminer le tournage de Recalé, une série Netflix dont vous tenez le premier rôle. C’est une nouvelle étape ?
J’espère ! Le cinéma me fait rêver depuis tout petit, et le tournage de la série était génial à vivre, même si c'était beaucoup de pression parce que c’est la première fois que j’avais un premier rôle. J’aimerais beaucoup passer devant la caméra avant de remonter sur scène pour un prochain spectacle.
Des projets en cours que vous pouvez évoquer ?
Je suis en train de tourner un nouveau film, mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant. À part ça, je n’ai rien de prévu, à part la reprise de ma tournée au mois d’octobre. Pour le reste, on verra à la rentrée. Mon spectacle en Corse, c’est aussi le début de mes vacances !