Nazione veut rassembler les nationalistes autour de l’inscription de la Corse sur la liste des territoires à décoloniser

Rédigé le 23/10/2024
Manon Perelli

Josepha Giacometti-Piredda, l'élue du mouvement indépendantiste, présentera une motion visant à demander l’inscription de la Corse sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser de l’ONU lors de la session de ce jeudi. En amont, Nazione tenait une conférence de presse ce mercredi afin d'expliquer cette démarche derrière laquelle le parti espère rassembler l'ensemble des nationalistes.

C’est une démarche sur le plan international que Nazione porte depuis plusieurs mois et qu’il attendait de voir enfin inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée de Corse. À l’occasion de la session d’octobre, l’hémicycle étudiera une motion déposée par son élue Josepha Giacometti-Piredda, visant à demander l’inscription de la Corse sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser de l’ONU. Ce mercredi, le mouvement indépendantiste tenait une conférence de presse afin d’expliquer sa démarche.
 
« La Corse répond à tous les critères juridiques et politiques afin de figurer dans cette liste », ont expliqué les militants. Et de détailler : « La Corse est bien un territoire non autonome à décoloniser au sens du droit international. Ces dernières années, l’État français a constamment démontré combien il méprisait l’expression démocratique des Corses et leurs droits en tant que peuple. Malgré les résultats électoraux sans appel en faveur du mouvement national et l’existence de délibérations adoptées à de très larges majorités par l’Assemblée de Corse, la volonté du peuple corse de choisir son statut politique, de voir sa langue reconnue comme officielle sur sa propre terre, de protéger son patrimoine foncier à travers l’instauration d’un statut de résident prélude à une citoyenneté corse, ou encore de maîtriser sa fiscalité et donc son modèle économique et social, s’est systématiquement heurtée aux vétos et autres lignes rouges parisiennes ». Dans ce contexte, le parti pointe que l’inscription de la Corse sur cette liste « vaudrait reconnaissance officielle de son droit à l’autodétermination et engagement de la communauté internationale de veiller à son effectivité ». 
 
« Le courant nationaliste a toujours dénoncé le fait colonial »
 
« On sait que cette inscription dans la liste des territoires à décoloniser de l’ONU est complexe mais possible », relève pour sa part Josepha Giacometti-Piredda en pointant d’autres territoires comme la Polynésie et la Kanaky, qui sont inscrits sur cette liste. « La Polynésie a été réinscrite en 2013, donc ce n’est pas si ancien que cela », glisse-t-elle. Si Nazione travaille sur ce projet depuis le début de l’année, il souhaite que « cette démarche ne reste pas une initiative de parti » mais soit au contraire « porté à l’échelle de la nation corse par l’ensemble des forces qui s’en réclament ». « Cette démarche a donc vocation à être au cœur d’une stratégie nouvelle pour le mouvement national en vue de constituer un véritable rapport de force politique et démocratique avec l’État français qui jusqu’à présent nous a fait sérieusement défaut », insistent encore les militants.
 
Dans cette optique, Josepha Giacometti-Piredda indique avoir déposée sa motion fin janvier. Si celle-ci aurait logiquement dû être instruite dans les deux mois, dans le cadre d’un circuit normal, « différents souhaits d’en rediscuter dans différentes commissions » ont repoussé son passage dans l’hémicycle selon l’élue indépendantiste. Signe d’un malaise face à cette demande qui intervient alors que le processus d’autonomie est toujours en cours et qui pourrait froisser Paris ? Pourtant, selon Nazione, le sujet devrait faire consensus au sein de la famille nationaliste. « L’un des fondamentaux du mouvement national, que ce soit du côté des autonomistes ou des indépendantistes, c’est bien la dénonciation du fait colonial. Les discours les plus fameux d’Edmond Simeoni ont toujours dénoncé le fait colonial, comme toutes les prises de position du courant nationaliste », souligne Josepha Giacometti-Piredda.
 
 
« Nous espérons que l’institution dirigée par une majorité nationaliste et majoritairement composée de nationalistes puisse se prononcer en faveur de ce texte et que cela puisse ouvrir la voie à une démarche commune sur cette question de l’ensemble du mouvement nationaliste », lance-t-elle, comme un appel du pied à l’ensemble des autres groupes nationalistes
 
Hasard du calendrier, la motion de Nazione sera étudiée alors que Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, en charge du dossier corse, entamera sa première visite en Corse. « Même si la chose est purement fortuite, le vote de la motion pourrait poser les termes d’un rapport de force démocratique et politique qui a manqué jusqu’à aujourd’hui dans les discussions avec Paris qui sont pour l’heure enfermées entre les calendriers parisiens et la plume parisienne. Cela nous permettrait de nous sortir de cet étau, mais ne veut pas dire que cela exclurait les discussions avec Paris, mais en revanche cela les inscrirait dans des perspectives qui replacent l’enjeu de la question nationale corse au bon niveauSinon on risque encore une fois d’enfermer la question dans des niveaux intermédiaires qui ne sont pas à la hauteur des enjeux, à savoir une solution politique globale », pose encore Josepha Giacometti-Piredda.