Cela faisait près de trente ans que la potabilisation de l’eau, à Bonifacio, était assurée dans deux bâtiments modulaires. Du provisoire qui n’avait que trop duré : en octobre 2024, est entrée en service la nouvelle unité de potabilisation de Cavallo Morte. L’équipement, censé être en mesure de répondre à l’afflux touristique et aux effets du changement climatique, a coûté plus de 7 millions d’euros pour sa construction. Il a été inauguré ce jeudi matin par les élus.
« Qui ne se souvient pas d’avoir vu, un jour, une baignoire d’eau marron à Bonifacio ? » Si le maire Jean-Charles Orsucci en sourit (jaune), il précise néanmoins que pendant toutes ces années, et malgré cette coloration parfois peu engageante, « l’eau a toujours été potable à Bonifacio ». De par sa situation d’enclave géographique, à l’Extrême-Sud de la Corse, la question de l’eau a toujours été centrale à Bonifacio. Au Moyen-Âge par exemple, des citernes avaient été construites dans les sous-sol de la ville fortifiée, pour y stocker les eaux de pluie. Aujourd’hui, ce sont les barrages de Figari, mais aussi de L’Ospedale qui approvisionnent en eau la cité des Falaises. Mais dans les années 90, le tourisme explose à Bonifacio, et les quelque 3 000 habitants sont multipliés par cinq ou six l’été venu. En conséquence, la ville fait installer en urgence en 1998 une unité provisoire de potabilisation à Cavallo Morte. Constituée de filtres mobiles déjà utilisés ailleurs, elle n’était conçue que pour fonctionner quelques années. Pourtant, le provisoire aura duré jusqu’en octobre 2024, même si des unités plus récentes sont venues renforcer l’installation de base à partir de 2015, permettant de maintenir un service continu et conforme à la réglementation.
37% des travaux à la charge de la commune
Ce n’est qu’en 2017 que le schéma directeur d’alimentation en eau potable inscrit la construction d’une nouvelle usine de potabilisation comme projet structurant. Lancé en 2019, le chantier est retardé par la crise sanitaire, puis par la guerre en Ukraine qui provoque un envol du coût des matériaux de construction. Pour Jean-Charles Orsucci, un tel projet ne pouvait pas reposer sur les seules épaules financières de la ville : « Nous avons besoin de la solidarité nationale pour pouvoir accueillir un si grand nombre de visiteurs chaque année chez nous. » S’il salue l’engagement de l’État, le principal financeur à hauteur de 58 %, le maire regrette que la commune ait dû porter son investissement à 2,41 millions d’euros, soit 37,10 %. La Collectivité de Corse (CDC) et l’Office d’équipement hydraulique de la Corse (OHEC) ont abondé de leur côté à travers un montant de 333 658 euros (5,12 %) : « J’aurais aimé un soutien un peu plus fort de la CDC », a reconnu l’édile bonifacien, au moment de son discours d’inauguration.
37% des travaux à la charge de la commune
Ce n’est qu’en 2017 que le schéma directeur d’alimentation en eau potable inscrit la construction d’une nouvelle usine de potabilisation comme projet structurant. Lancé en 2019, le chantier est retardé par la crise sanitaire, puis par la guerre en Ukraine qui provoque un envol du coût des matériaux de construction. Pour Jean-Charles Orsucci, un tel projet ne pouvait pas reposer sur les seules épaules financières de la ville : « Nous avons besoin de la solidarité nationale pour pouvoir accueillir un si grand nombre de visiteurs chaque année chez nous. » S’il salue l’engagement de l’État, le principal financeur à hauteur de 58 %, le maire regrette que la commune ait dû porter son investissement à 2,41 millions d’euros, soit 37,10 %. La Collectivité de Corse (CDC) et l’Office d’équipement hydraulique de la Corse (OHEC) ont abondé de leur côté à travers un montant de 333 658 euros (5,12 %) : « J’aurais aimé un soutien un peu plus fort de la CDC », a reconnu l’édile bonifacien, au moment de son discours d’inauguration.
Le projet a été confié au maître d’oeuvre Corse Ingénierie, qui était représenté par Paul-Félix Benedetti, ce jeudi matin à Bonifacio : « C’est l’ingénieur qui vous parle aujourd’hui », a introduit celui qui est aussi le leader de Core in Fronte. Et il a rappelé la nécessité d’améliorer le traitement de l’eau du barrage de Figari : « C’est une eau qui est d’excellente qualité, car elle vient de la montagne. Mais les effets des fortes chaleurs sur une retenue d’eau située en basse altitude - qui sont aussi peut-être liés aux effets du réchauffement climatique - font que s’y développent des micro-organismes, de type algues, bactéries ou cyanobactéries. L’eau du barrage de Figari peut paraître translucide, mais au 10 août, il y avait dedans un million de cellules vivantes par millilitre d’eau, soit un milliard par litre. » Et cet été, les effets de la sécheresse dans l’Extrême-Sud de la Corse, mais aussi l’impact des travaux qui doivent augmenter de 2 millions de mètres cube la capacité de stockage du barrage en 2027, font qu’il était devenu urgent de compter sur une usine de potabilisation moderne à Bonifacio. « Sans cette usine, on aurait eu une problématique, compte tenu de la qualité de l’eau de Figari cette année, reconnaît Christelle Longuet-Milleliri, la directrice générale adjointe de la municipalité bonifacienne. Il aurait sans doute fallu en passer par des restrictions d’eau sur la commune, ou repasser sur le barrage de l’Ospedale, lequel assure l’approvisionnement en eau à Bonifacio en période hivernale ». En effet, le taux de remplissage du barrage de Figari a chuté à 44 % il y a une dizaine de jours, ce qui a conduit l’OHEC à y déclencher des contrôles sur les cyanobactéries. Mais le taux de remplissage, à L’Ospedale, est également très préoccupant (41%).
"On était sur le fil du rasoir"
Fort heureusement, la nouvelle usine de potabilisation de Cavallo Morte a pu entrer en service à temps. Elle peut desservir l’équivalent de 30 500 habitants… sachant que Bonifacio en compte officiellement 3 269 ! Evidemment beaucoup plus l’été, souligne Christelle Longuet-Milleliri : « Durant le pic du mois d’août, on parle d’une consommation journalière de 6 000 mètres cube par jour. C’est six fois plus qu’en période hivernale. » Le dimensionnement du nouvel équipement lui permet d’aller encore au-delà du pic de consommation, à 6 500 mètres cube par jour : « Auparavant, on pouvait déjà subvenir à une consommation de 6 000 mètres cube par jour, mais on était sur le fil du rasoir », a constaté la DGA bonifacienne.
La nouvelle usine permet aujourd’hui une plus grande flexibilité opérationnelle, ayant été conçue pour s’adapter à la variabilité des eaux brutes issues des barrages de Figari et de l’Ospedale, ainsi qu’à l’ampleur des flux saisonniers. Elle est présentée également comme conforme aux nouvelles normes, notamment celle de la directive européenne de 2020, qui impose des seuils plus stricts pour les polluants dits « éternels » (les PFAS), les pesticides et autres micropolluants. Sa chaîne de traitement comporte dix phases successives, de la pré-ozonation au lagunage des boues, en passant par la double filtration et la reminéralisation. « Cette usine repose sur une technique simple de traitement : la filtration, synthétise Paul-Félix Benedetti. C’est l’addition des dix étapes de traitement qui fait que l’usine est complète. »
Fort heureusement, la nouvelle usine de potabilisation de Cavallo Morte a pu entrer en service à temps. Elle peut desservir l’équivalent de 30 500 habitants… sachant que Bonifacio en compte officiellement 3 269 ! Evidemment beaucoup plus l’été, souligne Christelle Longuet-Milleliri : « Durant le pic du mois d’août, on parle d’une consommation journalière de 6 000 mètres cube par jour. C’est six fois plus qu’en période hivernale. » Le dimensionnement du nouvel équipement lui permet d’aller encore au-delà du pic de consommation, à 6 500 mètres cube par jour : « Auparavant, on pouvait déjà subvenir à une consommation de 6 000 mètres cube par jour, mais on était sur le fil du rasoir », a constaté la DGA bonifacienne.
La nouvelle usine permet aujourd’hui une plus grande flexibilité opérationnelle, ayant été conçue pour s’adapter à la variabilité des eaux brutes issues des barrages de Figari et de l’Ospedale, ainsi qu’à l’ampleur des flux saisonniers. Elle est présentée également comme conforme aux nouvelles normes, notamment celle de la directive européenne de 2020, qui impose des seuils plus stricts pour les polluants dits « éternels » (les PFAS), les pesticides et autres micropolluants. Sa chaîne de traitement comporte dix phases successives, de la pré-ozonation au lagunage des boues, en passant par la double filtration et la reminéralisation. « Cette usine repose sur une technique simple de traitement : la filtration, synthétise Paul-Félix Benedetti. C’est l’addition des dix étapes de traitement qui fait que l’usine est complète. »
Seulement 15 % de fuites sur le réseau d'eau
Par ailleurs, parallèlement à la construction de l’unité de potabilisation, la commune a entrepris de colmater les fuites sur le réseau : « On était à 68 % de rendement avant 2010, on est passé à 85 % aujourd’hui », annonce Christelle Longuet-Milleliri. La ville se félicite de disposer d’un réseau « désormais solide, résilient et capable de supporter les fortes sollicitations estivales, garantissant un service durable et performant pour les Bonifaciens ». Lesquels ne verseront pas un centime de plus qu’aujourd’hui pour la potabilisation de l’eau, du moins jusqu’en 2029, date de la fin du contrat d’affermage qui lie la ville avec Kyrnolia. Et au-delà ? « L’objectif est de ne pas toucher au prix de l’eau, assure Jean-Charles Orsucci. Une nouvelle usine comme celle-ci permettra de faire des économies, car on ne paiera plus les gens à intervenir en urgence pour colmater des fuites, par exemple. » Une politique tarifaire de l’eau que sa municipalité a décidé « la plus basse possible pour un usage domestique », mais qui se répercute surtout sur la facture des commerçants bonifaciens, lesquels font payer in fine l’addition aux consommateurs, et donc principalement aux touristes.
Par ailleurs, parallèlement à la construction de l’unité de potabilisation, la commune a entrepris de colmater les fuites sur le réseau : « On était à 68 % de rendement avant 2010, on est passé à 85 % aujourd’hui », annonce Christelle Longuet-Milleliri. La ville se félicite de disposer d’un réseau « désormais solide, résilient et capable de supporter les fortes sollicitations estivales, garantissant un service durable et performant pour les Bonifaciens ». Lesquels ne verseront pas un centime de plus qu’aujourd’hui pour la potabilisation de l’eau, du moins jusqu’en 2029, date de la fin du contrat d’affermage qui lie la ville avec Kyrnolia. Et au-delà ? « L’objectif est de ne pas toucher au prix de l’eau, assure Jean-Charles Orsucci. Une nouvelle usine comme celle-ci permettra de faire des économies, car on ne paiera plus les gens à intervenir en urgence pour colmater des fuites, par exemple. » Une politique tarifaire de l’eau que sa municipalité a décidé « la plus basse possible pour un usage domestique », mais qui se répercute surtout sur la facture des commerçants bonifaciens, lesquels font payer in fine l’addition aux consommateurs, et donc principalement aux touristes.