Le ministre de la Santé, en visite en Corse : « On ne va pas construire un CHU, mais... »

Rédigé le 12/08/2025
Julien Castelli

Inaugurant la nouvelle maison pluridisciplinaire de santé de Sainte-Lucie de Porto-Vecchio, le ministre de la Santé Yannick Neuder a confirmé que l’État n’engagerait pas la construction d’un CHU (centre hospitalier universitaire) en Corse. Ce qui ne veut pas dire que rien ne va bouger : à la place d’un CHU, la Corse sera amenée à développer une « universitarisation » de ses filières.

Le ministre de la Santé, en visite en Corse : « On ne va pas construire un CHU, mais... »

Paul-André Colombani, en discussion avec le ministre de la Santé Yannick Neuder, mardi matin devant la nouvelle maison médicale de Zonza Sainte-Lucie de Porto-Vecchio.

En visite lundi à l’hôpital de Bastia, le ministre de la Santé avait déjà évoqué cette idée « d’universitarisation » des filières médicales en Corse : « L'idée, c'est de faire en sorte que les hôpitaux, mais aussi les maisons de santé, puissent accueillir des étudiants en stage, des externes, des internes qui puissent venir faire leur stage de médecine. » Et d’annoncer la présence, dès novembre 2026, « de 15 à 20 docteurs juniors dans des maisons médicales de santé. Il y aura aussi 15 internes de plus. On a autour de 290 lieux de stage pour eux. » 

À Sainte-Lucie de Porto-Vecchio ce mardi matin, il a précisé son ambition pour la Corse : « Cette universitarisation, ce sera un CHU à travers ses différentes structures. On ne va pas construire un nouvel hôpital, mais les différents hôpitaux de l’île pourront tous accueillir, à terme, sur un projet universitaire, des étudiants qui seront en formation en Corse. Des maisons médicales comme celle-ci vont pouvoir offrir une offre de soins de proximité. Et pour les cas les plus graves, il y aura une hospitalisation dans les différents hôpitaux de l’île. Enfin en cas de recours, si on ne trouve pas la solution, on fera appel au Continent, mais l’idée c’est quand même d’avoir un maximum de prises en charge médicales qui se fassent sur l’île pour diminuer tous ces transports sanitaires qui sont pénibles pour la population, et également coûteux. »

"Je ne suis pas un fétichiste du modèle CHU du Continent"

Le député de la circonscription, Paul-André Colombani, fut le dépositaire de la proposition de loi pour la création d’un CHU en Corse, laquelle avait été adoptée à l’unanimité, en novembre, par la commission des Affaires sociales à l’Assemblée nationale. « La Corse est la seule région de France sans CHU », avait tendance à rappeler, à intervalles réguliers, celui qui est aussi médecin généraliste dans la maison de santé qui a été inaugurée ce mardi à Sainte-Lucie-de-Porto-Vecchio. Il se montre pourtant très satisfait par l’annonce du ministre, alors même que celle-ci exclut la construction d’un CHU en Corse : « Moi, je ne suis pas un fétichiste du modèle CHU du Continent. Si on arrive au même endroit mais par un autre chemin, ça me convient parfaitement. Pour faire un véritable CHU, il faudrait quarante fillières, avec des équipes à constituer, de la recherche… Or, je le dis depuis le début, on ne pourra pas, avec quelques malheureux cas d’oncologie pédiatrique, développer de la recherche à Ajaccio. C’est pas possible. Par contre, il y a 400 femmes qui ont un cancer du sein, et aujourd’hui en Corse, elles n’ont pas de Pet Scan (un outil qui diagnostique les cancers avec précision, en détectant et évaluant les tumeurs et les métastases, NDLR). Elles n’ont pas d’équipes de soins structurées, comme dans les CHU. Elles ne peuvent pas bénéficier non plus d’essais thérapeutiques. C’est ça le sens de l’universitarisation : monter un service qui ait toutes les capacités d’action qu’on n’a pas aujourd’hui en Corse. »

"LE CHU, on l'aurait eu dans vingt ans..."

D’autant qu’une universitarisation des filières pourrait se mettre en place beaucoup plus rapidement qu’un nouvel hôpital à bâtir : « Il faudra structurer un maximum de filières en Corse, de type universitaire, dans les mois et les années qui arrivent, poursuit Paul-André Colombani. Aujourd’hui, il y en a deux ou trois qui fonctionnent très bien, autour du vasculaire notamment. Il serait bon de développer des filières universitaires autour de la cardiologie ou du grand âge, car le vieillissement de la population est une réalité en Corse. » Le député de Corse-du-Sud table ainsi sur le développement de « 25 ou 30 filières universitaires qui répondront à la qualité de soins que l’on a sur le Continent. » Cet objectif, « on pourrait l’atteindre à l’horizon 2030 ou 2032. Si on avait dû démarrer la construction d’un CHU, on l’aurait eu dans vingt ans… »