« L’ADN corse est très proche de l’ADN rugby », estime Florian Grill, le président de la FFR en visite sur l'île

Rédigé le 10/05/2025
Julien Castelli

En Corse depuis jeudi et jusqu’à dimanche, le président de la fédération française de rugby (FFR), Florian Grill, a été reçu en mairie de Porto-Vecchio, ce samedi après-midi. Un échange de plus d’une heure a eu lieu, en présence notamment du président de la ligue corse Dumè Marcellesi, des élus porto-vecchiais et des acteurs associatifs du Porto-Vecchio XV. Cette entrevue, jugée constructive par les intéressés, a servi à établir un état des lieux de l’Ovalie en Corse, tout en évoquant des pistes de travail.

La ligue corse de rugby compte 1 500 licenciés, un nombre qui laisse Florian Grill dubitatif. Car pour le président de la fédération française, en visite sur l'île jusqu'à dimanche, le potentiel existe pour doubler ce nombre : « Quand on y réfléchit, je ne comprends pas pourquoi le rugby n’y est pas beaucoup plus développé. Car l’ADN corse est très proche de l’ADN rugby. C’est un sport de caractère, qui sublime les caractères. Cette notion de sport de combat collectif, l’envie d’être ensemble, de resserrer les liens, d’être une deuxième famille, ça me paraît évident avec la Corse. »

L’une des raisons évidentes à ce sous-développement rugbystique tient en l’état des infrastructures corses, confirment unanimes les différents acteurs de l’Ovalie en Corse. « Quand on voit à Ajaccio, bassin de 100 000 habitants, les conditions dans lesquelles évoluent le Rugby club d’Ajaccio, ce n’est pas digne de notre sport aujourd’hui », regrette Dumè Marcellesi, plus jeune président d’une ligue régionale en France. On est donc contents que Florian Grill ait pu se confronter lui-même, sur le terrain, à une certaine forme de précarité du rugby corse... »

"Les filles qui se changent dans les vestiaires des arbitres, c'est plus possible"

​La FFR a établi un partenariat avec TotalEnergies dans le cadre du dispositif d’État des Certificats d’Économies d’Énergie (CEE), qui vise à soutenir la transition écologique des infrastructures rugbystiques à travers la France. À cet égard, Florian Grill souligne que « c’est une enveloppe de 35 millions d’euros qui existe pour l’amélioration des vestiaires ou des club-houses qui sont souvent des passoires thermiques. On peut les rénover avec des subventions pouvant aller de 10 à 80 %. » Les clubs corses pourront-ils en bénéficier ? « On a évoqué cette possibilité à Ajaccio, à Bastia, à Lucciana et aujourd’hui à Porto-Vecchio. » Mais pour que ces coups de pouce énergétiques puissent voir le jour, la FFR et TotalEnergies attendent de voir que des synergies se mettent en œuvre au niveau local :  « Il faut que les communes aient envie d’investir, qu’elles anticipent l’envie de rugby qui est croissante, en Corse comme ailleurs. Notamment au niveau des vestiaires féminins. Les filles se changent encore dans les vestiaires des arbitres. C’est plus possible », s’insurge Floran Grill.

Encourager la pratique du rugby à cinq à l'école

Or, durant ces journées d’échanges en Corse, le président de la FFR dit avoir senti « de l’écoute, très positive, bienveillante et proactive. » Notamment de la part de Jean-Christophe Angelini : « Ici, il y a un engouement populaire qui est parmi les plus élevés en Corse autour de la discipline, salue le maire de Porto-Vecchio. Mais oui, ce pays est malheureusement en retard sur beaucoup de plans. Rattraper notre retard en matière d’infrastructures et d’équipements, de proximité notamment, c’est quelque chose d’important et on a ce projet de construction d’une tribune au stade de Lecci (un projet porté par la communauté de communes Sud Corse, que Jean-Christophe Angelini préside). »

Durant l’entrevue porto-vecchiaise, Florian Grill a aussi avancé d’autres pistes de travail, comme la possibilité de former les professeurs des écoles au rugby à cinq, ou bien travailler auprès des agences régionales de santé pour encourager la pratique du rugby chez les personnes en situation de surpoids : « On est l’un des rares sports où ce n’est pas un problème. Le gamin ou la gamine qui va se mettre au rugby pourra se sentir bien dans sa tête. »

"Péripéties de transport"

Dumè Marcellesi espère aussi pouvoir développer la pratique du rugby féminin en Corse. A Porto-Vecchio, le nombre de femmes licenciées est passé en une année de six à vingt-huit, notamment grâce à une dynamique collective initiée par des mamans, ayant décidé de se mettre au rugby après y avoir inscrit leur progéniture. « À la ligue corse de rugby et au club de Porto-Vecchio, on est convaincu que le rugby est un vecteur d’inclusion sociale, qui dépasse le simple terrain, appuie Dumè Marcellesi, lui-même originaire de la micro-région (de Figari). À la ligue, nous souhaitons mener et déployer toute une série d’actions en termes de formation, de médiatisation du rugby féminin, du rugby entreprise, du rugby à cinq… » De son côté, Gérald Pescheux, le président de Porto-Vecchio XV, a trouvé l’entrevue instructive : « J’attendais une prise de conscience de la réalité du territoire. Au niveau des infrastructures, mais aussi par rapport aux grosses difficultés que nous rencontrons fidéliser un public. Il y a aussi les difficultés qui sont les nôtres en termes de transports, avec nos jeunes qui partent en sélection corse sur le Continent, en connaissant des péripéties de transport qui grèvent leur efficacité et s’ajoutent à leur charge mentale. »