Avions Rafale et renard sur la piste : au plus près de l'exercice "Volfa", sur la base aérienne de Solenzara

Rédigé le 03/10/2025
Julien Castelli

1 000 participants issus de plusieurs armées et pays, 50 aéronefs, 20 raids aériens et 12 bases aériennes, dont la BA126 de Ventiseri-Solenzara : c’est l’exercice « Volfa », l’un des entraînements militaires les plus importants piloté par l’Armée de l’air et de l’espace, et qui revient chaque année pour confronter les militaires à des scénarios toujours plus complexes. C’est dans ce cadre-là que quatre Rafale se sont posés, ce vendredi matin, sur la piste de la base de Ventiseri-Solenzara.

Selon le scénario établi des semaines à l’avance par les états-majors, six avions de combat Rafale devaient décoller, vendredi matin, de la base militaire de Mont-de-Marsan, dans les Landes, pour se rendre sur un théâtre opérationnel au-dessus de la Méditerrannée. « Ils avaient une mission défensive : protéger notre territoire contre des adversaires, détaille Julien Sabéné, général de division aérienne de l’Armée de l’air française. L’idée c’était de simuler un mix de missiles de croisière et de drones. Exactement ce que l’on voit à l’est de l’Europe. » Comme prévu, les Rafale ont décollé de Mont-de-Marsan, mais ce que leurs pilotes ne savaient pas – ils l’ont appris au dernier moment - c’est l’ordre reçu de venir conclure leur mission en Corse, sur la BA 126. « Leur mission n’était pas de se poser ici », confirme le colonel Mickaël Fonck, qui dirige depuis un mois la BA 126 Capitaine Preziosi. Mais l’imprévu fait partie du scénario : « Ca nous apporte résilience et agilité, en plus d’une plus grande capacité d’adaptation, à même de déstabiliser un adversaire potentiel », poursuit le colonel.

Le souvenir de l'opération Harmattan

Lui-même, en 2011, avait eu à faire face à un scénario complexe. En conditions réelles, puisqu’il se trouvait alors en pleine intervention militaire française en Libye. C’était l’opération Harmattan « et on avait fini par projeter nos avions de chasse sur la BA126 », se souvient le colonel, qui pilotait un Rafale. « A l’époque, c’était un scénario complexe, mais aujourd’hui on a plus l’habitude de le faire », convient-il. En quatorze ans, l’Armée de l’air française a en effet pu appréhender de nouvelles tactiques de combat, qu’elles soient offensives ou défensives, et pris le temps de les répéter après entraînement, notamment pendant les exercices « Volfa », que l’Armée de l’air reconduit annuellement.

« C’est fondamental d’être prêt, poursuit le général Sabéné. Vu l’environnement dans lequel on évolue au niveau géopolitique, il faut avoir un temps d’avance. Il faut être capable de faire face à toutes les situations et se préparer au combat de haute intensité pour, si jamais ça devait passer en mode escalatoire, être en mesure de réagir. » L’exercice "Volfa" se fait en coordination avec d’autres corps d’armée, français comme issus de pays alliés : « L’adversaire va nous attaquer dans les lignes de pliure, alors il faut que l’on travaille en bonne intelligence avec nos partenaires étrangers, pour faire de la masse, et être en mesure de s’imposer », souligne le général Sabéné. C’est l’objectif premier de « Volfa », et il convient sans cesse de remettre le métier sur l’ouvrage : « Les gens changent, on a des jeunes qui arrivent et il faut les mettre au niveau opérationnel. Mais si on le fait chaque année, c’est aussi parce que les modes opératoires adverses ne cessent d’évoluer. Donc on regarde ce qui se passe à l’étranger, dans les conflits. Et on essaie d’anticiper et faire en sorte que le scénario soit le plus réaliste possible pour que nos pilotes, s’ils devaient un jour être engagés sur de vraies opérations de haute intensité, ne soient pas surpris, mais au contraire déjà sereins et préparés à faire face à toute situation. »

Un renard qui traverse sur le tarmac !

Il était 10 h 25, ce vendredi 3 octobre sur la BA 126, quand deux Rafale sont subitement apparus dans le ciel, sous un angle de vision de 45 degrés. L’information de leur arrivée, au nord de la base, nous avait été communiquée un peu plus tôt, mais on avait beau scruter les montagnes et la mer, c‘était peine perdue : les Rafale sont conçus pour ne pas être détectables de trop loin. Ils ont atterri sur la base, bientôt suivis par les autres Rafale. Les six gravitaient bien autour de la base, pourtant seulement quatre ont atterri. Les deux autres ? Déroutés sur l’aéroport de Figari ! Un véritable imprévu, pas même prévu dans le scénario complexe des militaires, car l’un des pilotes des Rafale a aperçu un renard traverser la piste d’atterrissage. Quand un tel cas de figure se produit, « c’est remise de gaz, précise le colonel Fonck, et les pilotes regardent leur niveau de carburant. Car la consommation d’un avion de chasse, ça va vite. La marge de carburant pour le dégagement ne leur permettait pas d’être sûr de se poser à Solenzara, alors décision a été prise de les faire atterrir à Figari, dans le cadre d’un protocole automatisé par la base. » Un renard sur la piste ? « Ce sont les aléas », sourit le capitaine Adrien, l’un des pilotes des Rafale qui a pu, lui, atterrir sur la BA 126. Tout comme le commandant Antoine, qui raconte comment il a été mis au parfum des ficelles du scénario : « On a fait 1 h 45 de mission au large de Toulon, avant d’apprendre qu’on devait venir atterrir à Solenzara, pour disperser les moyens. Et en trente minutes, on y était. »