1 utilisateur sur 5 traite l’IA comme un ami : une enquête dévoile un nouveau rapport à la technologie

Rédigé le 02/11/2025
Léana Serve

Alors que l’intelligence artificielle s’infiltre partout dans notre quotidien, une étude menée par la plateforme Yiaho révèle un phénomène surprenant : un utilisateur sur cinq entretient avec son agent IA des échanges quasi humains, allant de la politesse à la colère, voire même à la tendresse. Une nouvelle manière de communiquer qui interroge sur les conséquences sociales de cette évolution technologique.

Alors que l’intelligence artificielle s’immisce de plus en plus dans le quotidien des Français, la plateforme Yiaho, qui propose plus de 70 agents IA spécialisés, a mené une étude pour mieux comprendre les usages et les comportements des utilisateurs vis-à-vis de cette nouvelle technologie. Fondée il y a trois ans à Bastia, Yiaho propose une grande diversité d’agents, chacun dédié à une tâche spécifique, allant du conseil fiscal au coaching personnel ou à la création ludique. L’enquête, menée sur la base de millions d’interactions entre janvier et juin 2025, s’appuie sur deux méthodes principales : d’une part, l’analyse des volumes de consultation et du temps passé sur chaque agent IA, et d’autre part, une analyse sémantique des échanges pour identifier les tonalités et les types d’interactions.
 

« On voyait déjà comment était utilisée l’IA, mais on nous demandait des statistiques parce que la plupart des plateformes n’ont qu’un seul chatbot et c’est difficile de savoir pourquoi les IA sont utilisées », explique Pascal Giorgetti, fondateur de Yiaho. « Nous, c’est beaucoup plus simple parce qu’on a plusieurs agents, par exemple une IA qui va donner des conseils fiscaux, et c’est alors plus facile de sortir des statistiques pour savoir comment et pourquoi les gens l’utilisent. Et la deuxième analyse a été faite en choisissant des mots-clés spécifiques qui sont ensuite ressortis de façon plus ou moins présente dans les discussions des utilisateurs. C’est comme ça qu’on a mené notre enquête. »
 

Ainsi, l’étude a démontré que 55 % des utilisateurs se servent de l’IA dans un cadre professionnel, que ce soit pour reformuler ou rédiger des textes (25 %), répondre à un mail ou un message (10 %) ou encore en soutien scolaire (20 %). Les 45 % restants utilisent l’IA de manière ludique, personnelle ou familiale, pour du coaching sur la parentalité ou la vie amoureuse (20 %), la création de contenu créatif (15 %) ou des jeux ludiques comme des générateurs de prénoms ou de quiz (10 %). « Elle est toujours autant utilisée pour la rédaction de documents par exemple, mais son utilisation est de plus en plus variée. »
 

1 utilisateur sur 5 parle à l’IA comme à un humain
 

Au-delà des simples usages fonctionnels, l’étude menée par Yiaho met en lumière un phénomène notable : un utilisateur sur cinq s’adresse à l’IA comme à un interlocuteur humain. Si 68 % des utilisateurs sont relativement neutres dans leur façon de s’adresser au chatbot, 11 % se servent de mots jugés « inutiles », 12 % sont amicaux et présentent des expressions de familiarité ou de politesse, et 9 % sont considérés « tendus » et montrent des signes d’agacement, voire de la violence verbale ou des insultes envers l’intelligence artificielle. Parmi les mots les plus utilisés, on retrouve « merci », « ciao », « ok », mais également des injures comme « ta gueule » ou « arrête d’inventer  ».
 

Des comportements contrastés qui témoignent d’un rapport complexe à la communication avec les machines. « Quand ChatGPT est sorti en 2022, les gens utilisaient l’IA d’une manière un peu technique, un peu froide, parce qu’elle n’était pas très perfectionnée, elle répondait un peu à côté. Au fur et à mesure, on s’est aperçu que plus les IA étaient performantes, plus les gens communiquaient avec l’IA comme si elle était une vraie personne. Ça n’a plus rien à voir parce que l’IA est de plus en plus fluide, et surtout, il y a des paramètres techniques qui font qu’elle peut retenir énormément de messages que vous avez échangés avec elle si vous créez un compte », analyse Pascal Giorgetti.

Mais ce phénomène interroge aussi sur la nature des liens sociaux à l’heure du numérique, notamment chez les plus jeunes. « C’est un sujet assez sensible, et c’est pour ça qu’on n’a pas encore passé le cap, mais on voit qu’il y a un vrai besoin de créer des agents IA pour de la compagnie : les gens veulent un copain virtuel à qui ils pourraient parler comme s’ils s’adressaient à leur meilleur ami », souligne le fondateur de Yiaho. « Mais on voit ça aussi comme un danger, notamment chez les jeunes qui parlent à l’IA comme si c’était leur petite copine ou leur petit copain. On voit que ça progresse là-dessus. Au tout début, les adolescents ne pouvaient pas penser qu’ils discuteraient avec une IA comme si c’était un ami, mais aujourd’hui, c’est tellement bien fait qu’un adolescent peut le faire s’il en a envie et il ne sera pas étonné des réponses. Plus ça va aller, plus l’IA risque d’être un compagnon. »