Requalification des cités des Lacs, des Arbres et des Monts à Bastia : les habitants expriment leur ras-le-bol face aux élus

Rédigé le 03/12/2024
David Ravier

La présentation du programme de réhabilitation urbaine pour les Cités des Lacs, des Arbres et des Monts qui s’est tenue lundi 2 décembre à la Maison des quartiers sud de Lupino a tourné court. Les habitants ont fortement exprimé leur mal-être et le sentiment d’abandon qu’ils ressentent au quotidien face à des élus qui ont tenté tant bien que mal de ne pas perdre la face.

Requalification des cités des Lacs, des Arbres et des Monts à Bastia : les habitants expriment leur ras-le-bol face aux élus

Les élus de la ville de Bastia tentent d'expliquer leur point de vue lors de la réunion publique à la Maison des quartiers sud.

Ils ne s’attendaient pas à pareil accueil. La Maison des quartiers sud de Bastia a fait salle comble, lundi 2 décembre, pour entendre ce que les représentants de la municipalité, de la Communauté d’agglomération de Bastia (CAB) et de l’Office public de l’habitat (OPH) de Corse, voulaient proposer pour le renouveau du quartier de Lupino. Initialement, le but de cette réunion était de parler de la transformation urbaine des Cités des Lacs, des Arbres et des Monts, situées au sud de la ville. Ce vaste chantier de rénovation de 50 millions d’euros, qui doit s’étendre jusqu’en 2030, a pour objectif de moderniser les habitations et de revaloriser ces quartiers, afin d’offrir une meilleure qualité de vie aux habitants. Si l’intention est louable, les principaux intéressés ne l’ont pas entendu de cette oreille et ne se sont pas faits prier pour le faire savoir. 

Un dialogue de sourds
Très vite, la réunion a tourné à la cacophonie, tant les habitants avaient à cœur d'exprimer les problèmes rencontrés au quotidien. « Les balayeurs ne passent plus », indique une habitante, « c’est une honte, c’est sale et on est obligé de faire le travail des agents à leur place », renchérit une autre, « il fait froid dans les logements », souligne une personne âgée, tandis qu’une octogénaire évoque les « odeurs d’égouts qui remontent à cause des canalisations bouchées ». Une habitante va même jusqu’à montrer, photo à l’appui, qu’elle est  « obligé de vivre avec les fenêtres fermées toute l’année à cause des rats et des cafards » qui rôdent autour de son logement. En quelques minutes, les problèmes d’insalubrité, d’isolation, de mauvaises odeurs, de pollution sonore et visuelle ont éclipsé la présentation du projet. Les habitants du quartier visiblement excédés, ont profité de cette tribune pour faire remonter tout leur mal-être, le tout devant des représentants municipaux et un bailleur social qui avaient du mal à cacher leur gêne, tant les reproches vis-à-vis de leur lenteur et de leur inaction étaient nombreux. 

Les élus ont néanmoins tenté d’apaiser la situation, à l’image d’Emmanuelle de Gentili, la première adjointe chargée de la politique de la Ville, qui a rappelé qu’elle « continue à faire des recherches de financements pour pouvoir investir et répondre à vos besoins » et ainsi augmenter l’enveloppe des 50 millions pour développer davantage de projets. De même, le maire de Bastia, Pierre Savelli, s’est montré sensible à la question des décharges sauvages qui font vivre un enfer aux habitants. Le premier édile a réussi à susciter la sympathie des riverains lorsqu’il a évoqué la mise en place prochaine de pièges photographiques pour prendre les pollueurs sur le fait et leur faire payer des amendes. Pour autant, à peine une piste d’amélioration était évoquée dans le nouveau projet qu’une nouvelle salve de critique survenait. 

De beaux projets sur le papier, mais déconnectés des réalités des habitants
Cela a notamment été le cas pour la place du commerce, le poumon économique du quartier. Dans son programme de renouvellement urbain, la mairie souhaite réaménager cet espace afin de valoriser ses commerces et de développer leur attractivité. Pour cela, elle souhaite retravailler la place dévolue à la voiture, en changeant notamment le stationnement avec la création de places à durée limitée ou de places de livraison. Michel, un des commerçants qui gère deux boutiques sur la place, ne s’est pas gêné pour dire que le projet « n’était pas viable » selon lui. « C’est bien sur le papier ce que vous faites, avec des images et des plans en 3D, mais venez voir la réalité », s’indigne-t-il, indiquant qu’il a perdu entre 30% et 40% de son chiffre d’affaires à cause, entre autres, des difficultés pour se garer sur la place du commerce. En effet, les habitants interrogés font remonter l’anarchie de stationnement qui règne sur cette place, et selon une des riveraines qui a souhaité conserver l’anonymat, « supprimer des places de parking rendra les choses encore plus invivables ». 

Pendant près d’une heure et demie, le dialogue a été quasiment impossible, avec d’un côté des élus qui s’accrochent à leur projet et qui tentent coûte que coûte de démontrer qu’il améliorera la situation petit à petit et de l’autre, des habitants fatigués d’entendre de belles promesses. « Cela fait 50 ans qu’il n’y a rien eu pour ce quartier, reconnaît Pierre Savelli à demi-mot, mais on essaie de faire plus et mieux. Cet argent que nous investissons, c’est pour vous, pour changer votre quotidien », tente de plaider le maire de Bastia, devant une assemblée qui reste inaudible à ses paroles qui ne sont malheureusement, selon les mots d’une habitante, « pas suivies d’effet sur le terrain ».