Jean-Baptiste Pascal (Bastia XV) : Un Corse champion du Monde de rugby à 7

Rédigé le 20/06/2024
Charles Monti

Victorieuse de l’Argentine (19-5) en finale ce dimanche 2 juin à Madrid, l’équipe de France de rugby à VII a remporté le dernier tournoi des World Séries et le titre officieux de championne du monde. Au sein du staff tricolore, un pur produit du rugby bastiais : Jean-Baptiste Pascal qui a fait toutes ses gammes au Casone sous les couleurs de Bastia XV et qu'une blessure a contraint à une reconversion d’analyste de performance des équipes de France de Rugby à 7.

Jean-Baptiste Pascal (Bastia XV) : Un Corse champion du Monde de rugby à 7

Jean-Baptiste Pascal avec l'entraîneur des "Bleus", Jérôme Daret (@FFR)

- Comment passe-t-on des catégories de jeunes de Bastia XV à analyste de France VII ?
- Alors on passe par beaucoup d’étapes. Je pense que ce qu’on doit retenir c’est avant tout la passion du rugby et de l’analyse. Ensuite forcément vient le travail avec des diplômes universitaires (Licence STAPS à Toulon et Master STAPS à Créteil et Cardiff) obtenus avec le soutien de tous mes proches. Mais cela ne servirait à rien sans la détermination de réussir. Je n'avais pas le droit de quitter l’île et mon cercle familial à 18 ans,  sans donner le meilleur de moi-même. Enfin de fil en aiguille, en enchaînant stages et expériences, j'ai franchi, petit à petit, tous les échelons.

- Cette blessure vous a privé de pratiquer, mais vous êtes malgré tout sur le terrain ?
- Exactement ! À 15 ans quand j’ai su que ce serait compliqué de rejouer au rugby sans me blesser à nouveau (multiples luxations d’épaule) je me suis demandé comment je pouvais poursuivre mon rêve du rugby professionnel. Et puis en regardant les matches à la télévision avec mon père, j’ai remarqué ces personnes en tribunes qui, derrière les ordinateurs, semblaient  importantes,  pour les coaches les consultaient régulièrement. En me renseignant un peu je me suis rendu compte que ça pouvait coller avec mes autres passions de l’époque (nouvelles technologies, statistiques…) et après le Bac en Science de l’Ingénieur, passé à Montesoro. J’ai foncé !

- Quel est le parcours à effectuer pour y parvenir ?
- Je suis donc passé par une Licence Entraînement Sportif puis par un Master en Analyse de la Performance en partie en Erasmus à Cardiff. J’ai aussi pu me former sur différents outils comme le Big Data ou le télépilotage des Drones. En parallèle j’ai fait mes armes dans plusieurs structures comme les clubs de rugby de Tarbes et de La Seyne, le centre de formation du Racing 92 ou bien encore les équipes de France Jeunes.

- Être analyste de France VII c’est quoi ?
- Pour faire simple j’ai deux missions principales : aider l’entraîneur-sélectionneur à faire les meilleurs choix pour l’équipe et une fois que ces décisions sont prises je dois faire en sorte qu’elles soient entendues, comprises, et avec confiance, par l’ensemble des joueurs avec toutes leurs particularités. Ainsi je suis créateur, passeur et traducteur du message pour la performance de l’équipe. Pour cela je dois utiliser plusieurs outils et méthodes d’analyses de manière pertinente.

- Que vous demande-t-on ?
- De mêler les analyses subjectives et objectives. Pour cela j'ai accès à plusieurs outils (logiciels spécifiques, caméras, drones, tablettes, big data, intelligence artificielle...) et je dois les mettre en harmonie pour répondre à mes deux missions. À cela je dois associer des compétences relationnelles, de maîtrise technologique, de connaissances rugbystiques, de managérat ou encore de statistiques.

- Comment vit-on cette situation ?
- C'est génial ! J'ai l'opportunité de vivre de ma passion en résidant aujourd'hui chez moi à Brando. Ça me permet aussi de me développer en tant que personne et j'en suis très content.
Je fais aussi ce métier pour gagner des matches et des titres. Les bons résultats sont là depuis quelques saisons et cela donne envie de continuer.

- Vous êtes très souvent loin de la Corse et de Brando ?
- On passe en moyenne 200 à 250 jours par an loin du domicile. En plus de cela nous faisons le tour du monde chaque saison en passant par exemple par Dubaï, Capetown, Perth, Los Angeles, Vancouver, Hong Kong, Singapour ou Madrid. Mais depuis 2 ans j'ai pu investir au village et donc y vivre sur le reste du temps. 

- Ces contraintes sont aussi susceptibles de grand bonheur comme cet ultime match face à l’Argentine au contact de joueurs comme Antoine Dupont notamment ?
- Effectivement, jouer le titre mondial et le remporter contre les Argentins qui étaient les mieux classés sur la  saison régulière est un grand bonheur. Nous avons marqué l'histoire de notre passage et nous voulons continuer. C'est le fruit de l'investissement et du travail accompli pendant de nombreuses saisons par plusieurs personnes et Antoine est le dernier venu dans cette belle aventure. Il a apporté avec lui la lumière des médias et du grand public et nous nous réjouissons que le travail ait porté ses fruits à ce moment-là.

 

"Faire la même chose aux Jeux Olympiques"

Jean-Baptiste Pascal (Bastia XV) : Un Corse champion du Monde de rugby à 7

Joie partagée avec Antoine Dupont (Capture d'écran)

- A quoi pense alors l’analyste toujours proche de Bastia et de la Corse ?
- Je pense à faire la même chose aux Jeux Olympiques cet été !
Un peu après le match j'ai pu voir mes parents et ma sœur dans les tribunes et je me suis souvenu que si cela faisait 10 ans que j'avais quitté Bastia, le chemin parcouru avait été colossal. Aujourd'hui je me dis que je suis exactement là où je voulais être, en parfaite harmonie avec mes valeurs.

- Ultime question sur votre parcours : n’est-ce pas la preuve que passer par Bastia XV peut mener à tout, même au plus haut niveau ?
- Absolument ! Je suis toujours licencié au club et au-delà d'être avec France VII, parmi les premiers champions du monde seniors du rugby français, je suis surtout fier que le nom de mon club y soit associé. J'emmène depuis 6 ans ma bandera partout autour du monde et à chaque fois que je la vois je me dis que c'est la preuve que l'on peut naître, grandir et évoluer chez nous et être aptes à faire de grandes choses.
Je veux porter ce message là le plus longtemps et le plus loin possible. Aussi je mets un point d'honneur à noter l'ensemble de mes destinations afin de ne pas oublier tous les endroits du Globe par lesquels je suis passé depuis le point de départ de cette aventure.