Autour de la Corse, une décennie d’odyssée scientifique et pédagogique au service de la mer

Rédigé le 05/07/2025
Manon Perelli

La 10ᵉ édition de CorSeaCare a largué les amarres le 28 juin dernier à Ajaccio. Jusqu’au 11 juillet, Mare Vivu reprend la mer pour cette expédition désormais emblématique autour de la Corse afin collecter des données sur la pollution plastique en Méditerranée et sensibiliser le grand public à ce fléau. Pour cette édition anniversaire, l’association s’est de plus dotée d’un catamaran, permettant à des scientifiques du CNRS d’embarquer à bord et d’amplifier les protocoles de recherche.

C’est une expédition qui a mûri en même temps que la conscience écologique d’une génération.  Une aventure d’étudiants qui s’est au fil du temps transformée en une odyssée au chevet de la Méditerranée. Le 28 juin dernier, CorSeaCare a pris la mer au départ d’Ajaccio pour deux semaines de navigation à la voile autour de la Corse afin de récolter des données sur la pollution plastique en mer et de sensibiliser le grand public à ce fléau. Un projet éco-citoyen imaginé en 2015 par Pierre-Ange Giudicelli et Anthony-Louis Fusella à la fin de leurs études. Poussés par l’envie d’agir, les deux jeunes hommes n’imaginaient alors pas ce qu’ils allaient découvrir. « La première édition de CorSeaCare était presque un projet d'été. Mais on s'est pris une énorme claque en découvrant l’état de la pollution plastique en Méditerranée. Cela nous a vraiment donné envie de structurer un outil qui permettrait d'aller plus loin, de témoigner de l'état des lieux de la Méditerranée et d'aller sensibiliser les gens », confie Pierre-Ange Giudicelli. L’année suivante, ils fondent Mare Vivu depuis Pinu. L’association se spécialise immédiatement dans la lutte contre la pollution plastique en Méditerranée, la promotion du zéro déchet, la sensibilisation aux enjeux énergie-climat et la préservation de la biodiversité marine. 
 
« On n'y connaissait pas grand-chose sur les différents sujets qu'on traitait. On avait juste cette envie-là d'être utiles, d'aider, de contribuer à la recherche, de faire passer des messages. Mais en fait, aujourd'hui, on a tellement travaillé qu'on est monté en compétence à la fois sur tous les domaines », explique le président de l’association qui compte désormais une dizaine de salariés qui œuvrent tout au long de l’année à informer le grand public, mais aussi les scolaires, les entreprises et les institutions sur la situation réelle de la Méditerranée, ainsi qu’à fédérer les acteurs scientifiques et associatifs autour de projets innovants et à fort rayonnement médiatique. Distinguée à plusieurs reprises au niveau national, l’association s’attache aussi à inspirer les citoyens à travers des actions engageantes et à former une génération de jeunes experts conscients des enjeux environnementaux et armés pour y faire face.
 

Mais l’expédition CorSeaCare reste cependant le projet le plus emblématique de l’association et a d’ailleurs été reconnue par l’Ademe en 2020 comme l’une des 15 initiatives de référence au niveau national pour la lutte contre les déchets marins. « Cette mission nous permet pendant deux semaines d’être quasiment tout le temps en mer avec pour objectif de réaliser tout un tas de contrôles pendant notre navigation et lors des escales à terre », souligne Pierre-Ange Giudicelli en indiquant que plusieurs protocoles sont réalisés durant la traversée comme des collectes de macro-déchets et de micro-plastiques à terre. « Cela nous permet d'avoir un état des lieux de la pollution autour de la Corse », précise le capitaine d’expédition. « Et puis c’est l’occasion d’aller à la rencontre du public pendant les escales. Comme il y a un côté aventure, on en profite pour proposer des conférences, des projections de films, des ateliers avec des enfants. On essaie de rencontrer un maximum de personnes et de témoigner des enjeux de préservation des écosystèmes marins en Méditerranée », ajoute-t-il en appuyant : « Notre intention première ce n'est pas de faire de la recherche sur notre coin et ensuite de faire un rapport que personne ne va lire pour dire qu'il faut agir. On connaît les limites de ce genre de méthode. Pour notre part, on s’inscrit dans quelque chose de plus direct et impactant ». Chaque année, l’association a d’ailleurs à cœur d’embarquer à bord de jeunes bénévoles afin de sensibiliser cette génération à « devenir des ambassadeurs de la mer ». « Ce n'est pas avec une poignée de chercheurs qu'on va arriver à avoir un impact et arriver à renverser un certain modèle de société .Il faut vraiment qu'on arrive à être beaucoup plus nombreux et avoir un levier qui permette de faire la bascule. Plus on a une communauté de gens qui sont informés sur les enjeux, qui se rendent compte qu'il y a de très belles choses à préserver et qui voient cela de leurs propres yeux, plus on va avoir une force pour peser dans les décisions », glisse encore Pierre-Ange Giudicelli. 
 
Afin de marquer comme il se doit le 10ème anniversaire de CorSeaCare, Mare Vivu a voulu réinventer l’expédition en troquant ses traditionnels trimarans par un catamaran, plus spacieux et mieux adapté aux manipulations à bord. « La nouveauté c’est que cela nous permet de faire des protocoles en mer notamment avec ce qu’on appelle un filet-manta qui vient récupérer dans un collecteur tous les fragments plastiques ou les micro-plastiques qui flottent », indique le président de Mare Vivu en dévoilant que deux chercheurs du CNRS ont de plus pris part à l’aventure.  « Jusqu’à l’année dernière, on collectait les données sur le terrain et on les transmettait aux chercheurs. Et cette année, ces deux chercheurs qui travaillent dans des domaines vraiment pointus sont montés à bord avec du matériel et leurs connaissances. C’est très enrichissant pour nous et cela nous fait encore franchir à une étape supplémentaire dans la compréhension des écosystèmes », se réjouit-il. Dix ans plus tard, l’odyssée continue, plus déterminée que jamais à défendre la Méditerranée.