Grève des pharmacies de garde : mobilisation massive en Corse contre les économies imposées aux officines

Rédigé le 02/07/2025
Patrice Paquier Lorenzi

Face aux 1,7 milliard d’euros d’économies annoncés sur les dépenses de santé en 2025, dont 500 millions sur le médicament, les pharmaciens ont entamé un mouvement de grève nationale. Lancée le 1er juillet, cette grève illimitée des gardes (nuits, dimanches et jours fériés) est particulièrement suivie en Corse.

Les pharmaciens et les médecins se mobilisent contre les mesures d’économies décidées à la suite du dérapage du budget des dépenses de santé. Le gouvernement prévoit en effet de réduire ces dépenses de 1,7 milliard d’euros en 2025, dont 500 millions ciblant le médicament. Une décision qui a déclenché un mouvement de grève national depuis ce mardi 1er juillet, particulièrement suivi en Corse. Sandrine Leandri, présidente de l’USPO (Union des syndicats de pharmaciens d’officine) de Corse, exprime son mécontentement : « Il s’agit d’une grève des gardes — c’est-à-dire les nuits et dimanches — pour une durée illimitée. Ce mouvement fait suite à une décision de l’État de réduire drastiquement les remises sur les médicaments génériques, une mesure qui met en péril l’équilibre économique de nombreuses officines. » Selon elle, la décision intervient après un constat budgétaire préoccupant : « L’État a constaté que les dépenses de l’Assurance maladie dépassaient les prévisions dès le mois de juin. L’enveloppe annuelle est déjà épuisée. En réaction, le gouvernement revient sur certaines revalorisations prévues. Les médecins spécialistes, les masseurs-kinésithérapeutes, les infirmiers… tout le monde est impacté. Pour les pharmacies, c’est la remise sur les génériques qui est visée. »

« Une perte de chiffre d’affaires de 80 000 euros pour les pharmacies »
Le gouvernement envisage de plafonner les remises accordées par les laboratoires aux pharmacies sur les médicaments génériques, à un taux compris entre 20 % et 25 %, contre environ 40 % actuellement. « Lorsqu’on achète des médicaments génériques, nous négocions des remises avec les fournisseurs. Ces remises nous permettent de générer une marge essentielle pour faire fonctionner nos officines : payer les salariés, les charges, l’électricité. Or, le gouvernement envisage de faire passer ces remises à 20-25 %. »


Selon la présidente de l’USPO Corse, l’impact de cette mesure sur le chiffre d’affaires des pharmacies insulaires serait considérable : « Pour les petites officines, notamment celles de village ou de montagne, cela pourrait signifier la fermeture pure et simple. D’après certaines études comptables, environ 800 pharmacies en France pourraient mettre la clé sous la porte. Pour une officine moyenne réalisant 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires, cela représenterait une perte de 80 000 euros par an, soit l’équivalent d’un poste salarié. En Corse, nos pharmacies rurales sont directement concernées. La remise sur les génériques représente une part importante de leur revenu, négociée à l’époque avec l’Assurance maladie en échange de notre engagement à promouvoir ces médicaments, plus économiques pour la collectivité. »

Sur l’île, environ 80 % des pharmacies de garde ont déjà rejoint le mouvement, un chiffre qui, selon elle, pourrait encore grimper : « Beaucoup ne sont pas encore de garde ce mois-ci et n’ont pas encore envoyé leur déclaration, mais nous pensons approcher les 100 % de participation. Cela montre à quel point la profession est unie et consciente de l’enjeu. Nous demandons le retrait pur et simple de ce décret. Nous refusons d’être la variable d’ajustement du budget de l’Assurance maladie. » Et de rappeler l’engagement constant des officines sur le territoire : « Nous avons toujours été présents, notamment pendant la crise du Covid, souvent seuls à maintenir un lien de proximité avec les patients. Nous faisons notre part. Mais aujourd’hui, cette mesure est injuste et met en péril tout un pan du système de santé de proximité. »

Dans un communiqué publié mardi, l’Agence régionale de santé de Corse indique que « les gardes des pharmacies seront assurées par les officines réquisitionnées par arrêté préfectoral » durant toute la durée du mouvement.