Ce mercredi 28 août, l’ADECEC a célébré le magazine Kyrn à l’occasion d’une journée dédiée à l’exploration de l’impact de cette publication sur la Corse des années 70 et 80. Un retour sur un journal qui a marqué une génération et façonné la presse insulaire.

La fabuleuse histoire de Kyrn a passionné le public ce mercredi au couvent de Cervioni.

À l’occasion de l’ADECEC 2024, ce mercredi 28 août a été l’occasion de rendre hommage au magazine Kyrn, véritable icône de la presse corse des années 70 et 80. Créé en décembre 1969, Kyrn a été un acteur majeur dans la transformation de la presse en Corse, oscillant entre le mensuel et l’hebdomadaire tout au long de son existence. Ce rendez-vous a permis de replonger dans l’histoire d’un journal qui a laissé une empreinte indélébile sur l’île.  Jacques Paoli, président de l’ADECEC, a ouvert la journée en soulignant l'importance de Kyrn :« Un incantu, Issu misincu prestu settimale hè forse u più grande scopu di u Riacquistu ».
Pour lui, Kyrn représente un des acteurs les plus importants du mouvement du Riacquistu, en couvrant des sujets variés comme la politique, l’économie, et la culture corses. La journée a vu la participation d’anciennes figures du magazine comme Sandra Alfonsi, Daniele Maoudj, Gjacumu Fusina, Toni Casalonga, Sampieru Sanguinetti et Charles Frigara.

Jacques Fusina, ancien collaborateur du mensuel, a évoqué l’impact de Kyrn sur la culture corse : « Kyrn le bien nommé restera dans notre vie culturelle un magazine de grand intérêt dont le rôle demeure essentiel dans le développement de la langue et de la culture corses à une étape importante de leur récente éclosion publique ». Il a rappelé que, malgré sa disparition en 1993, Kyrn reste une référence incontournable. Sandra Alfonsi, fille de Dominique Alfonsi, ancien directeur de publication, a évoqué le lien étroit entre le magazine et la Corse : « Rarement, une publication aura été si proche, si représentative de l’histoire et des évolutions de son territoire de naissance. Ce qui explique que plus de 30 ans après sa disparition en 1993 avec son numéro 397, ce journal reste encore une référence absolue, et un sujet de regret persistant pour ses contributeurs comme pour ses lecteurs. Kyrn a traversé un quart de siècle de l’histoire de la Corse, embrassé tout le spectre de la Corse. Février 1993 sonnera le glas d’une aventure journalistique originale ». Selon elle, Kyrn, qui a cessé de paraître en février 1993, reste un sujet de regret pour ses contributeurs et ses lecteurs.


Un magazine tourné vers l’avenir
Le numéro inaugural de Kyrn a été publié en décembre 1969 sous la direction d’Aimé Pietri, un journaliste dont le nom est indissociable de l’histoire de la presse corse. Dans son premier éditorial, Pietri a déclaré : « A la fois actuel et tourné vers l’avenir, et pourtant fidèle aux enseignements du passé, Kyrn sera le reflet, sans fard ni complaisance de la Corse telle qu’elle est. En espérant participer à la rendre, très vite, telle qu’elle devrait être ». Aimé Pietri, déjà correspondant pour des médias nationaux et internationaux, a apporté une perspective unique à Kyrn. Sampiero Sanguinetti, également présent lors de la journée, a rappelé le contexte de création de Kyrn : « En 1969, c’est le grand vide en Corse sur le plan audiovisuel ». Avec Aimé Pietri, le magazine s’est inspiré de l’hebdomadaire L’Express pour se réinventer en 1973. Sanguinetti a noté l’ambiguïté entre le journaliste et le militant, une caractéristique marquante de Pietri, qui a souvent suscité des tensions avec les pouvoirs publics.

Kyrn est devenu une référence incontournable, se distinguant par ses couvertures audacieuses et ses enquêtes approfondies. Le magazine a traité des sujets brûlants comme les Boues rouges de Montedison, les événements d’Aleria, et la montée du nationalisme. Selon Sandra Alfonsi, l’arrivée de son père Dominique comme directeur en 1988 a marqué un tournant pour le magazine, avec une réorientation vers une périodicité hebdomadaire et une maquette modernisée.

Le magazine a cessé de paraître au début de 1993 en raison de contraintes techniques et économiques. Sandra Alfonsi conclut : « Kyrn a été une aventure éditoriale et humaine profondément originale. De nos jours encore, certaines thématiques traitées dans Kyrn restent douloureusement d’actualité. Le titre, son rôle de témoin engagé, son indépendance et son audace éditoriale ont marqué les esprits ».


La couverture du numéro 1 de Kyrn en décembre 1969.